Patrimoine

Sur la proposition du Secrétaire d’État au Patrimoine, Pascal Smet, le gouvernement bruxellois a décidé de protéger en inscrivant sur la liste de sauvegarde comme site et comme ensemble certaines parties du Mont des Arts à Bruxelles.

« Le Mont des Arts, son esplanade, le jardin Pechère, la statue du roi Albert I^er, mais aussi les intérieurs et les meubles de la Bibliothèque Royale font partie du patrimoine bruxellois. Celui qui façonne Bruxelles, qui fait son identité. Nous avons tous des souvenirs à cet endroit. L’inscrire sur la liste de sauvegarde le préserve pour l’avenir sans le figer. Nous avons aussi voulu cette reconnaissance afin de renforcer l’obligation d’entretien qui incombe à ses propriétaires. La Région protège son patrimoine, au fédéral de l’entretenir », déclare Pascal Smet.

Histoire :

Situé entre la place Royale et la place de l’Albertine, le Mont des Arts constitue un ensemble monumental et paysager remarquable, conçu par les architectes Jules Ghobert et Maurice Houyoux et réalisé entre 1954 et 1969. L’aménagement des jardins est réalisé par l’architecte-paysagiste René Pechère.

 

D’une architecture monumentale et classicisante, fortement influencée par le style officiel et académique de la fin des années 1930, les bâtiments s’alignent de part et d’autre d’une vaste esplanade prenant la forme d’un jardin en terrasses, assis sur plusieurs niveaux de parkings, et accessible par d’imposantes volées d’escalier. La perspective s’ouvre d’un côté sur l’église Saint-Jacques-sur-Coudenberg (place Royale), de l’autre sur la tour de l’Hôtel de Ville de Bruxelles (Grand-Place).

 

Les bâtiments, sévères, se distinguent les uns des autres tout en étant réunis par une symétrie rigoureuse. Ils regroupent le Palais de la Dynastie et l’ancien Palais des Congrès (1958), rebaptisé Square en référence au cube de verre qui en marque l’entrée depuis 2010 ; un complexe de bureaux avec une galerie commerciale qui forme l’aile Nord ; et la Bibliothèque Royale Albert I^er, ou KBR (1969), au sud.

 

Le plan urbain vise à concilier un programme fonctionnel et une volonté de représentation formelle et grandiose. Il a pour ambition d’offrir un cadre de mise en scène à la ville qui mette en lumière des éléments existants (place Royale et tour de l’Hôtel de Ville) et plus récentes : la Bibliothèque royale, la statue équestre du roi, le Palais des Congrès. Dans sa volonté de création d’un ensemble monumental, le projet propose une réinterprétation des codes du développement urbain néoclassique. Il prolonge ainsi la place Royale, articulant le bâti autour d’un espace public majestueux qui distribue les fonctions et articule les circulations. L’aménagement du Mont des Arts traduit en effet la volonté de mise en scène du paysage urbain. Le relief est exploité afin de mettre en valeur la monumentalité du bâti environnant.

 

L’intervention de l’architecte de jardin René Pechère dans la réalisation du jardin public est centrale dans la composition du Mont des Arts et dans son intérêt paysager. L’architecte-paysagiste y a développé un programme classique contemporain se déployant en différents compartiments dont subsiste aujourd’hui la partie centrale. La composition esthétique s’appuie par ailleurs sur une prouesse d’ingénierie qui fonde l’intérêt technique du site. Premiers jardins suspendus conçus sur une telle surface en Europe, ils bénéficient à ce titre d’une notoriété internationale. Avec les jardins classés de la villa van Buren (Uccle), ce jardin constitue l’une des réalisations les plus emblématiques du paysagiste bruxellois, figure majeure de l’art des jardins au XX^e siècle.

 

Pour agrémenter le site, l’État belge a également fait appel à de nombreux artistes auxquels il confia la réalisation de bas-reliefs, de sculptures et de fontaines, l’ensemble formant aujourd’hui un témoignage artistique inédit et représentatif de la production artistique belge dans le domaine de la statuaire au milieu du XX^e siècle (Oscar Declerck, Oscar Jespers, Gustave Jabobs, Dolf Ledel, Charles Leplae, Marcel Rau, etc.). Ce remarquable ensemble qui se déploie dans le site s’inscrit dans un programme artistique cohérent, très influencé par le style Art Déco. Parmi ces œuvres, la plus symbolique est sans conteste la statue équestre du roi Albert I^er d’Alfred Courtens, qui doit surtout sa renommée à ses œuvres monumentales classiques, ses portraits de la dynastie belge et ses bustes d’officiels, emprunts de force et de grandeur à l’instar de ce qu’exprime la statue équestre du Mont des Arts.

 

Certains aménagements intérieurs ont fait l’objet d’un soin particulier et ont, eux aussi, été imprimés de cet aspect fonctionnel et solennel exprimé dans l’architecture. On le constate notamment dans les espaces de circulation (halls d’entrée, cages d’escalier) où le marbre, matériau luxueux, est utilisé en abondance, ainsi que par le choix de la mise en place d’un mobilier moderniste, sobre et élégant. La loge royale et la salle de conférence The Arc, qui conservent un ensemble décoratif et mobilier des années 1960 parfaitement cohérent et intact, en témoignent de manière remarquable. Il est très probable que ces aménagements mobiliers aient été confiés à la firme Kortrijkse Kunstwerkstede Gebroeders De Coene, qui a réalisé l’aménagement intérieur de l’ensemble de la Bibliothèque royale, à la fin des années 1950. Originaire de Courtrai, l’entreprise a acquis durant l’entre-deux-guerres une dimension et une réputation internationale avec la production de ses meubles en bois laminés.

Décision:

Sont inscrits sur la liste de sauvegarde en raison de leur intérêt historique, esthétique, artistique, technique, paysager, urbanistique et folklorique :

- l’esplanade, en ce compris le Jardin central de René Pechère et le jardin latéral au nord longeant la voirie, ainsi que les sculptures et les fontaines ;

- la statue équestre du roi Albert I^er ;

- les façades et les toitures de l’ancien Palais des Congrès sis Mont des Arts

- le hall d’entrée côté rue Ravenstein,

• le hall d’entrée principal côté esplanade et orné de la peinture murale de Paul Delvaux,
• le hall de réception orné de la peinture murale de René Magritte,
• la cage d’escalier principale en ce compris la peinture murale de Louis Van Lint et la sculpture de Dolf Ledel,
• la loge royale, en ce compris les éléments de décor et de mobilier d’origine qui en font partie intégrante ,
• la salle de conférence The Arc située au deuxième étage, en ce compris les éléments de décor et de mobilier d’origine qui en font partie intégrante ;

- les façades, les toitures et le patio sud-est de la Bibliothèque royale Albert I^er (ou KBR) sise Mont des Arts 28-boulevard de l’Empereur 2-4-place de la Justice 8-9-10, ainsi que certains espaces intérieurs, en ce compris leur aménagement décoratif et leur mobilier conçus par l’entreprise Kortrijkse Kunstwerkstede Gebroeders De Coene qui en font partie intégrante :

• le vestibule d’entrée historique, son vestiaire et ses cabines téléphoniques,
• la cage d’escalier principale,
• les deux cages d’escaliers secondaires situées de part et d’autre de l’aile du boulevard de l’Empereur,
• la salle de lecture des Imprimés contemporains, avec son espace d’accueil, ses comptoirs de prêt, la salle des catalogues, des bibliographies et la salle de travail en mezzanine,
• les salles de lectures des sections spécialisées des Imprimés anciens et précieux, des Manuscrits ainsi que des Cartes et Plans,
• la salle de conférence,
• l’auditorium de la section de musicologie,
• la cafétéria,
• l’appartement de fonction du conservateur,
• la salle du « Musée » dans l’aile du boulevard de l’Empereur,
• la salle du conseil,
• le bureau du conservateur,
• les bureaux de l’administration dans l’aile du boulevard de l’Empereur.